Une seconde vie, Dermot Bolger

« L’Irlande dans laquelle elle vivait était infectée par un terrible virus appelé respectabilité. Dieu était souvent évoqué, mais pas à propos de l’amour qu’il fallait ressentir pour son prochain ni de l’éternelle damnation : la vie tournait uniquement autour de ce que tes voisins pensaient de toi, de secrets à garder, du scandale à éviter, il ne fallait donner à personne l’occasion de te mépriser. »

J’ai toujours entendu beaucoup de bien de la littérature irlandaise, mais n’ai encore jamais eu l’occasion de me pencher sérieusement sur la question. Mes quelques rares excusions dans l’univers du roman irlandais se sont relevées très prometteuses, avec les romans de Maggie O’Farrell, par exemple, ou avec Inishowen de Joseph O’Connor. Et j’ai toujours gardé dans un coin de ma tête cette idée de lire plus de romans irlandais, de découvrir de nouveaux auteurs. Une animation sur l’Irlande dans ma médiathèque m’a incité à faire une lecture imprévue au programme de mes lectures de janvier. Je suis contente d’avoir spontanément choisi Une seconde vie de Dermot Bolger, un roman qui m’a énormément émue.

Présentation de l’éditeur

Sean Blake réchappe de justesse à un accident de voiture à la suite duquel il a été, pendant quelques secondes, déclaré cliniquement mort. À son réveil, bouleversé, Sean perçoit le monde tout à fait différemment, comme s’il débutait une nouvelle existence. Mais ce n’est pas la première fois que Sean voit sa vie modifiée. À six semaines, il a été retiré à sa mère, une jeune fille forcée par la société et l’Église de le laisser à l’adoption. Avec le sentiment d’être devenu étranger à sa femme et à ses deux enfants, et très certainement en premier lieu à lui-même, Sean décide de partir à la recherche de cette mère dont il ne sait rien.

En quête de son identité

Une seconde vie est un roman sur la recherche de ses origines, de son identité et de soi-même. Un très grave accident de voiture arrête la course folle des tracas du quotidien de Sean Blake, photographe de presse et père de deux enfants en bas âge. Ayant frôlé la mort, il est miraculeusement ramené à la vie, mais tous ces repères ont disparu. Il se sent perdu et n’arrive plus à reprendre le cours normal de sa vie, malgré le soutien et la présence à ses côtés de sa femme et ses enfants.

« J’aurais dû être parti, moi aussi, mais une seconde chance m’avait été offerte. Alors pourquoi ne pouvais-je pas me réjouir plutôt que de rester assis dans le noir à élaborer des autoportraits imaginaires, comme si j’avais eu désespérément besoin de prouver que j’existais encore ? »

Et le mystère de sa vie vient de nouveau le hanter : qui est-il ? D’où il vient ? Né d’une jeune mère inconnue forcée à l’abandonner à la charge de l’Église, il a été adopté quelques semaines après sa naissance. Les raisons et les circonstances de son abandon, le mystère sa famille et de sa mère biologique, toutes ces questions lui ont toujours fait peur, reléguées tout au fond de sa tête. Mais maintenant, il ne peut plus continuer à ignorer ses plaies béantes du passé. Pour redonner du sens à sa vie, il part à la recherche de sa mère biologique…

Mon avis

Un signe qui ne trompe pas que ce roman m’a énormément plus, c’est le très grand nombre de citations que j’en retiens. La thématique abordé est aussi extrêmement sensible et peut difficilement laisser indifférent : ce roman nous parle d’un traumatisme irlandais ayant marqué la conscience collective. Il nous parle des blanchisseries de la Madeleine, ces institutions religieuses où des femmes dites « perdus » ont été confinées dans le but de « laver leurs âmes ». Soumises à du travail forcé, aux humiliations quotidiennes, aux sévices physiques et psychologiques, elles restaient dans ces endroits pour une durée indéterminée, parfois pendant toutes leurs vies. En cas de naissance, elles étaient forcées à abandonner leurs enfants au profit des familles catholiques respectables et plus méritantes.

« …j’ai grandi dans un monde où la respectabilité était l’objet d’un culte général. Ivrognerie, violence domestique, n’importe quel péché était  accepté, à condition de rester caché. Les couvents et les asiles étaient des lieux indispensables où ce qui pouvait salir la respectabilité était dissimulé ; des lieux dont on fait semblant de penser qu’ils n’existaient pas, et non où l’on pouvait entrer et affronter les choses.« 

Mais la plus grande qualité de ce roman pour moi, c’est qu’il décrit le problème dans toute sa complexité, avec toutes les nuances du gris, en prenant compte du contexte. Si on début de cette quête la colère déborde – celle de Sean, mais aussi la nôtre – au fur et à mesure des rencontres et des découvertes, on se sent de plus en plus apaisé. C’est une histoire infiniment triste, mais on ressort de cette lecture avec un cœur en paix…

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