Villette, Charlotte Brontë

« Le monde peut comprendre à la rigueur qu’on puisse mourir de faim, mais peu de gens sont à même de concevoir qu’on puisse perdre la raison à force de vivre dans la réclusion et la solitude ».

A ce jour, j’ai lu trois romans de Charlotte Brontë et je les ai trouvés tous complétement différents. Si Jane Eyre raconte une histoire pleine d’espoir d’une orpheline qui cherche sa place dans la société rigide de l’époque victorienne, Shirley est marqué par un réalisme social omniprésent. Charlotte Brontë y décrit l’histoire économique et sociale de sa Yorkshire natale, les luttes entres les classes, la violence de la révolution industrielle. Le roman Villette quant à lui m’a paru bien plus personnel, mais aussi bien plus pessimiste que les autres. Ayant enchainé Shirley et Villette, j’ai été très surprise de constater à quel point ces deux romans ne se ressemblaient pas. Pourtant seulement quelques années ont séparé leur écriture et leur publication.

Présentation de l’éditeur

Lucy Snowe, 14 ans, a développé une profonde affection pour le jeune Graham Bretton, fils de sa marraine. Leur attachement est mutuel, mais le père de Graham vient bientôt récupérer son fils. Peu de temps après leurs adieux, Lucy doit quitter la maison. Après quelques hésitations, elle est engagée comme aide par Miss Marchmont, une dame handicapée. À la mort de celle-ci, pleine d’attentes et d’espoirs, Lucy prend un navire pour le royaume de Labassecour et sa capitale, Villette, où elle est employée comme institutrice à l’internat pour jeunes filles de Mme Beck. Dans cette école, un certain Dr John rend souvent visite à la coquette Ginevra, dont il est amoureux. Mais on apprend que le Dr John n’est autre que Graham Bretton. Bientôt, Lucy et lui renouent. Charlotte Brontë a transposé dans son dernier roman, de façon à peine voilée, son expérience de préceptrice à Bruxelles, dans la pension de M. Héger. (Je précise que ce résumé n’a pas grand chose à voir avec l’histoire réellement racontée dans ce roman)

Roman d’inspiration autobiographique

L’héroïne de Villette, Lucy Snowe n’a rien d’héroïque : c’est une jeune fille réservée, effacée dont la vie se passe à l’ombre des autres vies. Sans illusions, sans famille, ni ressources, elle est seule au monde et décide de tenter sa chance comme institutrice dans le royaume de Labassecourt (La Belgique fictive). Au bout de moult péripéties, elle parvient à intégrer un pensionnat pour jeunes filles de Mme Beck. Une nouvelle vie d’institutrice commence pour elle… Une vie honnête mais sans éclat. C’est un choix étonnant que de placer au centre du récit un personnage décrit comme insignifiant. Lucy est témoin d’événements importants dans la vie des autres personnages, mais pas la sienne. Malgré des liens amicaux qu’elle parvient à nouer, sa vie est noyée dans la solitude qui frôle parfois la dépression…

« Pour moi, envisager l’avenir n’était pas espérer : aucune consolation, aucun réconfort, aucune promesse de changement ou d’amélioration quelconque ne me permettait de supporter le présent avec plus de courage, dans l’attente de jours meilleurs. Je sentais peser sur moi le poids d’une triste indifférence pour toutes les choses d’ici-bas ; et ma résignation était à peine suffisante pour ce qui me restait à vivre… »

On sait que pour l’écriture de ce roman Charlotte Brontë s’est inspirée de son deuxième séjour en Belgique dans la pension de M et Mme Héger où elle a connu le désespoir des sentiments non partagés. Je ne sais pas dans quelle mesure elle s’est identifiée à Lucy Snowe mais certains passages avaient été tirés des événements ayant réellement eu lieu (comme par exemple, la scène de confession dans une église catholique). On y ressent aussi parfois des sentiments et des émotions authentiques, comme par exemple dans la description de cette attente déchirante des lettres qui ne venaient pas…⠀En même temps, Lucy n’est pas une jeune fille faible et complétement démunie. A plusieurs reprises, elle fait preuve d’un caractère fort et résolu. Elle est indépendante et reste toujours fidèle à ses convictions, mais elle n’a aucun espoir, aucune illusion pour sa vie et pour son avenir.

Mon avis

Très personnel et même d’une certaine manière autobiographique, ce roman est donc assez sombre et même un peu pessimiste et déprimant dans l’ensemble. Il semble dire que certaines personnes ne sont pas destinés à connaître le bonheur et qu’ils doivent se contenter de très peu. Dans les précédents romans de Charlotte Brontë, ses personnages connaissent également le désespoir et la souffrance, mais à la fin ils se retrouvent toujours récompensés. Je ne dévoile rien de la fin de Villette, mais j’avoue avoir été frustrée par la tournure des événements et le rebondissement final. Cela n’enlève rien aux qualités littéraires de ce romans, mais j’aurais tellement aimé qu’il se termine différemment !

Ma note : ★★★

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